Jeudi 30 janvier - Fermeture de l'ESJ Paris suite à une intervention antifasciste sur la façade de l'établissement

Dans la nuit du 29 au 30 janvier 2025, dans le cadre de la campagne Désarmer Bolloré, la façade de l'Ecole Supérieure de Journalisme (ESJ) de Paris s'est vue largement redécorée et affublée d'un nouveau sous-titre "Bolloré Fascise la France". Suite à cette intervention, la direction a décidé de fermer l'établissement jusqu'au 3 février. Voici le communiqué qui nous a été transmis par les personnes qui se sont regroupées pour interpeller ainsi avec éclat sur l'avenir de l'ESJ.

le communiqué des personnes qui ont participé à l'action

"Ce 29 janvier 2025, dans le cadre de la campagne Bolloré, nous avons dénoncé l’entreprise de Fascisation de la France par l’empire médiatique de Bolloré. Nous avons visé l'Ecole Supérieure de Journalisme de Paris rachetée en novembre 2024 par un groupe d’investisseurs milliardaires dont Vincent Bolloré, Bernard Arnaud et Vincent Bolloré. Ce rachat dénoncé par des centaines d’étudiant.es issu.es de 26 écoles de journalisme dans une tribune publiée il y a quelques jours1 est « une nouvelle expression de la subordination de l’indépendance journalistique à des intérêts économique, politique et idéologique. »

Stoppons Bolloré, stoppons la fascisation de la France !".

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le rachat de l'ESJ Paris c'est quoi ?

En effet, sous couvert de "sauver une école" qui était en difficulté financière, comme se plaît à le rappeler Vianney d'Alençon, ces milliardaires mettent en réalité la main sur une pépinière de journalistes formatables à leurs idées réactionnaires puis prêts à intégrer les rédactions de leurs médias. C'est ce même entrepreneur catholique qui a d'ailleurs été nommé à la présidence de l'établissement. « Le rachat de cette école par une poignée de milliardaires est à leur image : un faux-nez. L’ESJ Paris n’a jamais fait partie des écoles de journalisme reconnues par la profession. Elle joue de son homonymie avec la prestigieuse et centenaire ESJ Lille, avec laquelle elle n’a pourtant aucun lien » explique le secrétaire général du SNJ-CGT, Pablo Aiquel, également ancien élève de l’école lilloise.

A l'instar de la croisade "civilisationnelle" menée par Vincent Bolloré, ou encore l'intervention dans les élections américaines du techno-fasciste Elon Musk, la concentration des médias aux mains de quelques milliardaires réactionnaires leur offre aujourd'hui une capacité de nuisance inédite. Fort de sa fortune construite sur le pillage des économies africaines, Vincent Bolloré a acquis de nombreux titres de presse écrite (Journal du Dimanche, Paris Match, Prisma Media, etc), plus de 200 maisons d'édition (via Hachette) et des chaînes de télévision et de radio (Canal +, C8, CNews, Europe 1, etc.). Il a patiemment développé son arsenal de propagande médiatique qu'il met de manière décomplexée et en toute impunité au service de l'extrême droite. Comme l'historien des médias Alexis Levrier le rappelle, un "basculement s’est opéré dans l’univers des médias français en moins d’une décennie. Jamais dans notre histoire les lignes idéologiques de l’extrême droite n’avaient été portées par des médias si nombreux et si complémentaires, puisque Bolloré est présent dans la presse écrite, dans la radio, dans la télévision, mais aussi dans l’édition, la communication, la musique ou le cinéma."2

Vincent Bolloré ne se contente pas d'un simple rachat, il a une méthode maintes fois éprouvée pour faire de ses médias des engrenages bien huilés de la conquête de l'hégémonie culturelle dans laquelle il s'est engagé : remplacement de la direction, purge et renouvellement des équipes. Que l'on se rappelle Canal +, un média connu auparavant pour une certaine impertinence critique qu'il a vidé progressivement de sa substance en pratiquant une violente casse sociale, une suppression des émissions jugées les plus dérangeantes, une mise au placard des journalistes d'investigation comme l'a vécu Jean-Baptiste Rivoire, etc. Plus récemment, il a nommé Geoffroy Lejeune, ancien directeur de l'hebdomadaire d'extrême droite "Valeurs Actuelles" à la tête du "Journal du Dimanche", générant d'une part la stupéfaction de la rédaction qui entra aussitôt en grève, mais aussi et surtout la droitisation immédiate de la ligne éditoriale lors de son arrivée à la direction malgré l'opposition des salarié.es.. Plus récemment, il a évincé l'ancienne directrice de la maison d'édition Fayard pour y placer Lise Boël, éditrice de Zemmour et de Philippe de Villiers, surnommée "l'éditrice des réacs". Dans la foulée, la maison d'édition est mis au service du Rassemblement National avec la publication du livre de Jordan Bardella en 150 000 exemplaires dont le plan de bataille communicationnel a été orchestré par les filiales de Vivendi et la distribution a été amplement assurée dans les points Relay, également détenus par le groupe Bolloré.

« Ces milliardaires, et notamment Bolloré, ont besoin de former des jeunes militants d’extrême-droite aux techniques journalistiques, pour remplir leurs antennes et les pages de leurs journaux. Les règles de déontologie, la charte de Munich et les pratiques professionnelles leur importent peu. Ce n’est pas un hasard si chez CNews, la grande majorité du personnel a moins de 5 ans d’ancienneté, la plupart ont tout juste fini leurs études », explique le secrétaire général du SNJ-CGT, Pablo Aiquel, également ancien élève de l’école lilloise.

Mais ils ne détenaient pas encore les instituts de formation des journalistes dont les critères lui semblaient sans doute beaucoup trop exigeants. Avec le rachat de l'ESJ, Vincent Bolloré pourra désormais promouvoir ses médias au sein de cette école ou encore orienter adéquatement les axes et programmes de formation et ainsi avoir sous la main des rédactions zélées, prêtes à servir ses idées.

Footnotes

  1. https://www.nouvelobs.com/medias/20250122.OBS99323/nous-etudiantes-et-etudiants-en-journalisme-appelons-a-un-sursaut-pour-proteger-l-independance-des-medias.html

  2. https://theconversation.com/la-crise-politique-que-nous-vivons-prouve-la-reussite-du-combat-civilisationnel-mene-par-vincent-bollore-232457

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