Grenoble, Intrusion dans les locaux du laboratoire LEPMI pour dénoncer la collusion Bolloré-université
Mercredi 29 janvier, sur le campus de Grenoble, diverses organisations locales ont appelé à se rassembler pour se joindre à la campagne Désarmer Bolloré et dénoncer la collusion entre la recherche publique et les intérêts du milliardaire réactionnaire. Dans une ambiance festive, 200 personnes, dont de nombreux d'étudiant.es, se sont élancées à travers les bâtiments universitaires, pour se rendre dans les locaux du LEPMI. C'est dans ce laboratoire qu'est réactualisée depuis 2022 la coopération entre l'UGA et Blue Solutions, en vue de produire toujours plus de batteries au lithium.
Depuis 2022, deux laboratoires ont en effet été initiés entre Blue Solutions, filiale du groupe Bolloré produisant des batteries solides Lithium Métal Polymère, et des laboratoires de recherche : l’un à Grenoble (LI2) impliquant l'UGA et le CNRS, l’autre à Nantes (IMNBlue Lab), avec le CNRS et Nantes Université. Les travaux de recherche issus de ce partenariat doivent contribuer, selon les annonces des directions de ces laboratoires, à "concevoir une nouvelle génération de batterie lithium métal avec des performances améliorées". Pourtant, Blue Solutions dispose déjà en son sein d’un service de recherche et développement rassemblant plus de 150 personnes. Mais ce dont il s’agit ici, c’est de capter, au profit d’intérêts privés, le travail effectué au sein d’organismes publics par des personnels (chercheur.ses, technicien.nes, mais aussi tout le personnel administratif environnant ces travaux), relevant tous et toutes en principe d’une fonction publique d’État, en plus de bénéficier de larges subventions. L'université de Grenoble n'est pas sans savoir que les profits des entreprises liées à Bolloré sont depuis quelques années directement réinjectés dans des outils de propagande racistes, sexistes, climato-dénialistes et dans des dispostifs de tentative de mise au pouvoir de l'extrême droite.
Ce partenariat complaisant illustre au contraire magistralement la dérive d’une recherche publique fondée sur une mise en concurrence des laboratoires entre eux afin « de lever les derniers verrous scientifiques » pour répondre « aux performances exigées en particulier par les constructeurs automobiles »1. Le contrôle par la filière industrielle et ses enjeux immédiats de production et de vente, antithétique avec une prise en compte réelle des enjeux environnementaux ou de justice sociale, s’opère alors ouvertement au détriment d’une réflexion sur les besoins réels des personnes.
Ces collaborations revendiquées au nom d'une "synergie avec le monde socio-économique », de manière à ce que « les entreprises associées à la gouvernance universitaire soient là pour accompagner l’établissement dans la formation des futurs ingénieurs et managers », disent tout d’un projet de contrôle de la société – y compris de ses espaces de recherche, et de création de connaissance – par Bolloré ou ses homologues.
Et illes espèrent que ça passe crème. Mais nous allons dorénavant bien visibiliser là où cette collaboration se fait, et ne plus les laisser en paix. Et nous avons commencé ce mercredi : emporté par la fanfare et la batuk, le cortège s'est joyeusement introduit dans les locaux, pour rappeler que la "transition énergétique" à la sauce Bolloré est un leurre capitaliste et néo-colonial aux conséquences environnementales en réalité destructrices..
Pour produire ses batteries, une matière première est en effet indispensable : le lithium. Le groupe prévoit d'ores et déjà de s'accaparer le lithium d'Amérique du sud, avec la bénédiction du gouvernement français. Un accord a en effet été signé en 2010 avec Eramet, dont l'Etat est actionnaire à 27% (NBP : https://reporterre.net/Un-groupe-minier-francais-detruit-un-desert-unique-au-Senegal), pour extraire du lithium en Argentine. Un pays qui fait partie du « triangle du lithium » (ABC : Argentine Bolivie Chili) d'Amérique Latine, où les grands groupes se livrent une guerre acharnée qui pèse lourdement sur les peuples autochtones et détermine les politiques des pays concernés. Il faut rappeler que le lithium n'est en aucun cas une matière "verte". Son extraction exponentielle au profit de Bolloré a au contraire de lourdes conséquences en terme d'épendage de déchêts toxiques sur des larges portions de territoire, de pollution de l'eau mais aussi de production de gaz à effet de serres. (https://www.projetvert.fr/extraction-lithium-pollution/ )
Pour finir la visite et troubler l'ordre discret de la coopération Bolloré - UGA, des petit-es lutin-es se sont amusé-es à repeindre le bâtiment et à déclencher l'alarme incendie... Avisé, le cortège repart ensuite solidairement alors que les camions des forces de l'ordre s'approchent - sûrement appelés par la sécurité du campus. Les manifestant-es auront quand même eu le temps de sympathiser avec quelques uns des vigiles, finalement eux aussi bien hostiles à Bolloré, avant de repartir en continuant de scander «Bolloré casse toi, l’UGA n’est pas à toi ».